j’ai choisi la chambre la plus chère la plus grande la moins sordide tout est relatif cette rivière sensée être mon refuge déjà n’en a plus l’air au contraire elle me regarde avec son frtFRTfrt un peu sale ses berges ses criques la rivière tout entière ne me fait penser qu’à une truite échouée comme la patronne et ses yeux loupes pourtant lors de mon précédent passage il y a quelques mois pour un café au comptoir il faisait beau j’étais joyeuse alors tout était vif l’eau chantait la patronne était solidaire bien que j’aie trouvé moyen de la vexer un peu en lui racontant piapiapia que je connaissais l’endroit depuis avant qu’elle rachète l’hôtel avec son mari désormais défunt j’avais clairement en tête nos chronologies respectives et croisées je revenais au refuge avait-elle tout oublié de notre passé commun cette femme autrefois heureuse et ne pouvait-elle au moins accueillir une cliente sans qu’on l’imagine au cœur d’un de ces polars glauques des années cinquante bourrés de femmes perdues portant une jupe droite un foulard sur la tête et cette voix de pleureuse qui fume des gauloises et quand on est en quelque sorte le rejeton de ces femmes on met du temps à comprendre qu’elles ne ressemblent pas exactement à madame l’institutrice ou à ma tante parce qu’elles ont eu ou vont avoir des relations sexuelles ce que ces années signalent par le simple fait de mettre une femme à fichu au centre de l’intrigue
c’est absolument vrai la femme héroïne a une sexualité
et sa façon de le faire remarquer sa façon d’attirer l’opprobre pauvre sotte nécessite la complicité de la mode féminine chaque décennie ayant son fichu ses lunettes son décolleté ses bas sa voilette son fume-cigarette et quand il n’y avait rien encore et qu’on était tenue fermée dans un donjon quelconque
quand on est tenue fermée dans un donjon quelconque on se fait remarquer par ses rêves ou ses seules pensées